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« AU NOM DE LA TERRE » CINÉ-DEBAT A LA PALETTE LUNDI 4 NOVEMBRE A 20H

CINE DEBAT AUTOUR DU FILM « AU NOM DE LA TERRE »

AU CINEMA « LA PALETTE » À TOURNUS

LUNDI 4 NOVEMBRE 2019 A 20H

ANIMÉ PAR BERTRAND VEAU, MAIRE DE TOURNUS

EN PRESENCE DE :

– CECILE DUBART, boulangère paysanne,

– JEAN PAUL MEULIEN, éleveur cultivateur en transition,

– MICHEL D’OZENAY, expert en production alimentaire

TRIBUNE – LIBRE EXPRESSION

Les propos figurant dans cette rubrique n’engagent que leur auteur. Nous les reprenons pour alimenter le débat sur le modèle agricole.

LETTRE DE MAXIME DE ROSTOLAN (FONDATEUR DE FERMES D’AVENIR) ADRESSÉE À LA PRÉSIDENTE DE LA FNSEA, CHRISTIANE LAMBERT

Chère Christiane Lambert,

Nous avons tous deux l’amour du monde paysan mais des visions relativement éloignées du modèle agricole idéal, et si j’admire la ténacité et la constance dont vous faites preuve pour défendre l’agriculture industrielle et chimique, je les regrette aussi puisqu’elles enfoncent les travailleurs de la terre dans une situation de moins en moins vivable.

Vous vous plaignez ces derniers temps de l’agribashing, et pointez du doigt les ‘militants écologistes’ qui par leurs propos et campagnes d’actions blesseraient les agriculteurs et dévaloriseraient leur travail.

De mon point de vue, c’est en n’imaginant pas qu’ils puissent sortir du cadre qui leur a été imposé depuis les années 60 qu’on insulte les agriculteurs et qu’on leur refuse la place et la considération qu’ils devraient avoir dans la société.

Alors que le modèle agricole dit ‘conventionnel’ a montré ses limites (extinction de la biodiversité, pollution des eaux, explosion des maladies notamment dues aux perturbateurs endocriniens, émissions insensées de gaz à effet de serre, précarité du secteur et tendance alarmante à la destruction des emplois, désertion des zones rurales,…), et que l’écrasante majorité des français souhaite que soient interdits les pesticides de synthèse, beaucoup d’agriculteurs aimeraient s’engager dans une transition mais affirment ne pas pouvoir changer de pratiques du jour au lendemain. Et pour cause : la politique agricole biberonnée au modèle industriel les a incités depuis des décennies à s’agrandir et s’équiper de machines toujours plus perfectionnées et chères. A s’endetter. Au point de ne plus pouvoir faire marche arrière.

Ce n’est pas vous que je vais devoir convaincre : l’Etat n’est pas à la hauteur, l’Europe pas plus. Cachant sous le tapis les montagnes de dépenses publiques directement dues aux pratiques agricoles (santé, dépollution de l’eau, algues vertes, etc.), ils continuent de subventionner un modèle qui accentue ces impacts. Double peine pour les français (dégâts écologiques et humains + leurs impôts pour financer cette mécanique percée), peine intégrale pour les agriculteurs qui ne vivent plus, et jackpot pour quelques poignées d’actionnaires.

Les citoyens, eux, plébiscitent les produits bio, privilégient le local et envisagent de manger moins de viande. Ils sont le carburant de la renaissance agricole, quel dommage de les voir comme les fossoyeurs du monde paysan, qui se meurt en réalité sous les contraintes du capitalisme débridé.

Il me semble que la réconciliation, nécessaire, entre les français et les agriculteurs, ne pourra s’opérer que dans une dynamique constructive à même de dessiner ensemble un avenir désirable pour nos assiettes et nos campagnes.

De fait, sur plusieurs sujets, nous aurions tout intérêt à faire front commun pour proposer une alternative crédible au monde défendu par les lobbys de l’agro-industrie, qui jusqu’à présent sert de boussole aux décisions politiques et coûte très cher à la société, et aux agriculteurs.

Évoluant depuis des années dans le secteur, et après avoir contribué aux Etats Généraux de l’Alimentation, j’ai identifié quelques pistes (selon moi) pertinentes pour amorcer une vraie transition agricole…et vous propose ainsi que nous unissions nos forces pour obtenir des dirigeants politiques :

– Une PAC intelligente, dont les aides seraient plus fonction du nombre de salariés que de la taille des parcelles,

– Une rémunération pour les services écosystémiques rendus par les agriculteurs, dès lors qu’ils permettent, par les techniques qu’ils adoptent, de faire des économies à la collectivité,

– Une TVA abaissée sur la bio,

– Une incitation fiscale pour planter des arbres,

– Une transition d’un modèle de spécialisation à échelle industrielle vers une dynamique de fermes en polyculture-élevage à taille humaine,

– L’obligation de devoir fournir un diagnostic de la vie du sol à chaque cession de parcelle,

– Et, last but not least, une remise en question des accords de libre-échange qui favorisent un marché hypermondialisé et des distorsions de concurrence absurdes.

Je ne doute pas que vous validerez le bien-fondé de chacune de ces propositions, et que nous pourrons prévoir de manifester ensemble, agriculteurs en détresse et citoyens engagés pour les générations futures, notre détermination à les faire appliquer.

Pour conclure, je profite de cette lettre pour vous poser une question, que je formule systématiquement lorsque je rencontre des représentants du modèle ‘conventionnel’ (mais qui reste toujours sans réponse…) : Que deviendra la ferme France lorsque le baril de pétrole passera à 200$ ?

A moins que vous ne sachiez nous prouver que cela n’arrivera pas, il convient de se poser incessamment la question pour assurer les arrières, et l’avenir, de ceux dont tout le modèle repose encore sur cet ‘or’ noir.

Pour mémoire, l’usage des produits phytosanitaires, largement responsable de l’empreinte carbone de l’agriculture, devait être divisé par deux entre 2008 et 2015. Il a sur cette période augmenté de 22%…

Nous sommes des millions à votre disposition, et celle du monde paysan, pour pousser des propositions de bon sens qui feront du bien à 100% des français et du vivant.

Cordialement,

mAx